Contribution n°69 à l’enquête publique

Monsieur le Commissaire Enquêteur,

Nous revenons vers vous car il nous semble important de vous rapporter les propos de M. le Maire de Saint-Colomban dans la presse de mercredi (voir ci-joint article OF) et aussi, à cette occasion, de vous poser ou rappeler certaines de nos questions.

L’article précise donc les points suivants :

– 1 : « L’abandon du projet Lafarge » : pourtant le dossier mis à enquête publique porte à notre connaissance qu’il a été « reporté » (voir réponse GSM à la MRAe). Ce point est loin d’être anecdotique puisqu’il place le projet présenté par GSM dans un contexte complètement différent. En effet, s’il n’y a qu’un report, il y a maintien du projet Lafarge, avec tout ce qu’il convient de considérer à terme comme impacts cumulés. Cette approximation pourrait nuire à une bonne compréhension de la situation globale.
=> Pour mémoire, nous remettons en pièce jointe la carte globale des projets envisagés.

– 2 : Que « l’abandon » de Lafarge et la baisse de production de GSM à 250 000 tonnes aura pour conséquence d’aller chercher le sable à Vritz « cela représente 8000 camions par an, équivalents à 840 000 tonnes de CO2 » ajoute le Maire.
Outre le fait qu’il n’y a aucune précision concernant les 8000 camions ni sur le fait d’aller prendre du sable à Vritz pour l’emmener à St-Colomban, le résultat présenté concernant les émissions de CO2 est totalement erroné.
En effet, regardons dans un 1er temps l’ensemble des émissions de gaz à effet de serres (GES) des transports poids lourds en France : il était de 28,6 Millions de tonnes (chiffres 2022 du ministère de la transition écologiquehttps://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/edition-numerique/chiffres-cles-transports-2022/19-emissions-de-gaz-a-effet#:~:text=Part%20des%20secteurs%20dans%20les%20%C3%A9missions%20de%20gaz%20%C3%A0%20effet%20de%20serre&text=En%202020%2C%20les%20transports%20sont,en%20repr%C3%A9sentaient%2031%2C1%20%25), voir graphique « émissions de GES des modes de transport »).
=> Les émissions de GES émises par ces « 8000 camions » représenteraient donc à eux seuls près de 3% de l’ensemble du transport poids lourd en France ! Impossible donc…

Nous avons alors refait le calcul, que nous vous détaillons dans le document joint.
Notre conclusion : si on conserve l’hypothèse des 8000 camions sur un transport de 170km aller/retour Vritz/St-Colomban (hypothèse donc surévaluée et même irréaliste), on obtient un total annuel d’un peu plus de 2500 tonnes d’émissions de CO2 ! Nous sommes très très loin des 840 000 tonnes annoncées.

Pour une bonne compréhension de la globalité de la situation, rappelons au passage que les maisons ne sont pas faites qu’en sable. Pour celles qui sont en béton ou parpaings, il faut ajouter du ciment, beaucoup de ciment…
Reprenons alors notre calculette : on garde cette même hypothèse des 8000 camions, à raison de 12 tonnes / camion cela représente donc près de 100 000 tonnes de sable. Il faudra y ajouter du gravier, de l’eau et, sur cette base, environ 30 000 tonnes de ciment.
Chaque tonne de ciment émet environ 850kg (0,85t) de CO2 dans l’atmosphère (page 90 du livre « béton, enquête en sable mouvants », jointe)…
=> Notre calculette affiche donc au final 25 500 tonnes d’émissions de CO2 !

Comme nous l’avons indiqué dans la contribution n°29 (et son doc joint), nous sommes donc bien sur un rapport de 1 à 10 à minima, entre transport du sable et émission de GES du ciment. Autrement dit : l’arbre des émissions de CO2 du transport du sable, cache la forêt de celles du béton. Le sable est une ressource non renouvelable et le ciment, par son principe même et quelles que soient les énergies utilisées pour le fabriquer, est donc très fortement émetteur de GES.

De nouvelles extensions des carrières, que ce soit à Saint-Colomban, Grand-Auverné, Soudan ou St-Sulpice-des-Landes (qui ne sont que les seuls exemples du 44 des projets actuels de carrières de sable), participeront donc à prolonger ce système globalement nocif.
Ne conservons donc le sable, matériau précieux, que pour les usages essentiels !

Mais au-delà de l’extraction du sable, les carrières sont aussi pour les industriels une belle opportunité de déposer des « déchets inertes ». Le 2ème extrait joint du livre « enquête en sables mouvants » montre à partir de l’exemple de l’entreprise Orllati en Suisse, l’intérêt des carrières à générer de l’extraction, pour profiter ensuite de l’opportunité d’avoir des trous pour y enfouir les déchets de chantier, en particulier ceux de bâtiment à l’obsolescence programmée.
Ce principe est officiellement appelé en France « valorisation ». Il permet dans notre pays de satisfaire aux règles européennes sur ce sujet.

La particularité à Saint-Colomban, c’est que ces « déchets inertes » vont baigner définitivement dans la nappe phréatique des affluents du lac de Grand-Lieu !

Cela nous amène à ces questions pour lesquelles nous ne trouvions pas de réponse dans le dossier :
– D’où proviennent géographiquement les déchets qui seront « valorisés » et quelles sont les émissions de GES qui découleront de leur transport ?
– Les prix pratiqués pour l’enfouissement définitif des déchets inertes sont-ils à la hauteur de ce qui est décrit dans le livre, à savoir 30€/m3 ?

Il conviendrait donc de prendre dès aujourd’hui de nouvelles orientations. Les carriers auraient déjà dû changer de cap il y a 25 ans, quand ils ont promis qu’ils ne s’étendraient pas à Saint-Colomban. Au lieu de cela il mettent aujourd’hui la pression sur tout un territoire pour prolonger leurs pratiques encore un peu, et puis encore un peu et peut-être encore un peu…

Mais jusqu’où ?

3- Autre point : le Maire laisse à penser par ailleurs que la baisse du tonnage demandé par GSM s’est faite à la suite d’une négociation (« le dossier actuel a été revu à la baisse par rapport à 2022 »). En fait elle est simplement due aux circonstances économiques actuelles. Comme en 2012 pour GSM qui a demandé de passer de 300 000 à 500 000 tonnes ou Lafarge en 2018 qui a demandé de passer de 350 000 à 420 000 tonnes, demain GSM demandera une augmentation de tonnage si son commerce l’exige, tout simplement.

Aussi, cela repose notre question de la contribution n°29 (voir son doc joint en page 5) : quelle est la destination précise du béton fabriqué avec le sable de St-Colomban ? Quels sont les engagements réels et pérennes de GSM sur son « utilisation locale », comme le laissent à penser les interventions entendues depuis le début de ce projet?

Vous savez que la position du Maire sur des sujets aussi complexes est importante, en particulier dans une commune rurale où tout le monde le connait. Dans le cadre d’une enquête publique où le dossier à consulter est particulièrement conséquent et contient une quantité énorme d’informations, ses déclarations dans la presse pourraient être celles qui resteront dans les têtes, au mépris des informations du dossier et des véritables questions de fond qui se posent (enfin !) à cette occasion.

L’enquête publique concerne en particulier la mise en compatibilité du PLU dont le Maire a la charge. Il doit donc rester dans un rôle de neutralité. Il doit être, avec vous, le garant de son bon déroulement. Ses déclarations ici ne le permettent vraiment pas.

Nous tenions à vous en faire part afin que vous preniez les bonnes dispositions en conséquence. Dans le cas où aucun démenti ne serait publié dans les délais les plus brefs, nous demanderons bien sûr un droit de réponse dans la presse.

Nous restons bien sûr à votre disposition
Recevez nos sincères salutations

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